Joseph Lebeau : Différence entre versions
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Il refuse en 1851 l'offre du roi de revenir au pouvoir. Il renonce à son mandat de député en 1863. Il retourne à Huy après les élections de 1864 et y meurt en mars 1865. | Il refuse en 1851 l'offre du roi de revenir au pouvoir. Il renonce à son mandat de député en 1863. Il retourne à Huy après les élections de 1864 et y meurt en mars 1865. | ||
− | ==Biographie d'après René Dubois== | + | |
− | Au commencement de l'avenue Godin-Parnajon, s'élève la statue de Joseph Lebeau, une de nos illustrations nationales les plus pures. Arrêtons-nous avec respect devant cette grande figure et rappelons à la génération actuelle ce que fit pour son pays cet homme d'Etat éminent, probe et désintéressé, cet orateur à la voix puissante et chaleureuse. « Publiciste, orateur, législateur, ministre, M. Lebeau, dit Th. Juste, se distingua dans toutes les positions où il fut appelé. Cependant, reconnaissons-le, son vrai, son incontestable titre de gloire, c'est la part considérable, exceptionnelle même, qu'il prit à la fondation du royaume de Belgique. D'autres hommes, remarquables à divers titres, contribuèrent également à faire aboutir la révolution de 1830. Mais, sans vouloir diminuer le mérite de leur intervention, disons que M. Lebeau possède des droits particuliers à la gratitude de la postérité. Il prit l'initiative, et il assuma la glorieuse responsabilité des actes mémorables qui prévinrent l'anéantissement de la Belgique, redevenue indépendante. Cette grande mission noblement remplie, avec un heureux mélange d'audace et de prudence, avec un rare désintéressement, avec une abnégation admirable, doit assigner à M. Lebeau une place éminente dans l'histoire contemporaine. » Lebeau, Jean-Louis- Joseph , naquit à Huy le 3 janvier 1794, dans une maison de la Grand'Place, vers la rue des Brasseurs et occupée actuellement par M. Delhauteur. (On devrait bien y placer un écriteau rappelant ce fait). | + | ==Biographie d'après René Dubois, publié dans les Rues de Huy en 1922== |
+ | Au commencement de l'avenue Godin-Parnajon, s'élève la statue de Joseph Lebeau, une de nos illustrations nationales les plus pures. Arrêtons-nous avec respect devant cette grande figure et rappelons à la génération actuelle ce que fit pour son pays cet homme d'Etat éminent, probe et désintéressé, cet orateur à la voix puissante et chaleureuse. « Publiciste, orateur, législateur, ministre, M. Lebeau, dit Th. Juste, se distingua dans toutes les positions où il fut appelé. Cependant, reconnaissons-le, son vrai, son incontestable titre de gloire, c'est la part considérable, exceptionnelle même, qu'il prit à la fondation du royaume de Belgique. D'autres hommes, remarquables à divers titres, contribuèrent également à faire aboutir la révolution de 1830. Mais, sans vouloir diminuer le mérite de leur intervention, disons que M. Lebeau possède des droits particuliers à la gratitude de la postérité. Il prit l'initiative, et il assuma la glorieuse responsabilité des actes mémorables qui prévinrent l'anéantissement de la Belgique, redevenue indépendante. Cette grande mission noblement remplie, avec un heureux mélange d'audace et de prudence, avec un rare désintéressement, avec une abnégation admirable, doit assigner à M. Lebeau une place éminente dans l'histoire contemporaine. » '''Lebeau, Jean-Louis- Joseph , naquit à Huy le 3 janvier 1794''', dans une maison de la Grand'Place, vers la rue des Brasseurs et occupée actuellement par M. Delhauteur. (On devrait bien y placer un écriteau rappelant ce fait). | ||
Élevé par un oncle, curé à Hannut, il entra comme employé dans l'enregistrement. Cela ne l'empêcha pas de poursuivre ses études ; il fut reçu docteur en droit ; ' il s'établit à Liége, en 1822 et y fonda, en 1824, avec Paul Devaux et Charles Rogier, le Mathieu Laensberg; ce journal fit place ensuite au Politique, qui ne tarda pas à devenir un adversaire redoutable du gouvernement. La révolution opérée, le gouvernement provisoire, qui avait nommé Lebeau premier avocat général à Liége, le désigna pour faire partie de la commission chargée d'élaborer la Constitution. Sa ville natale l'envoya siéger au Congrès National avec M. Dautrebande. « On ne tarda pas à reconnaître en lui, non seulement un grand talent de parole et de sérieuses connaissances, mais aussi l'initiative, le coup d'oeil, la prévoyance et le courage du véritable homme d'Etat. » Le 27 mars 1831, il fut nommé ministre des Affaires Etran-gères. Lorsque vint la discussion du traité des Dix-huit articles, on ne peut se figurer la violence du débat, dit M. Juste, que nous suivons : « Des groupes menaçants entouraient le palais de la Nation, et on avait entendu un cri sinistre : Lebeau à la lanterne! lorsque, le 5 juillet, ce grand patriote demanda la parole. A grand'peine put-il dominer les murmures de l'assemblée frémis-sante et les furibondes clameurs des tribunes. Mais il déconcerta bientôt ses adversaires par la franchise et l'énergie de son exorde. « Je suis décidé, dit-il, qu'il y ait acceptation ou non des préliminaires, à quitter le ministère. Je suis en droit, après avoir pendant trois mois compromis ma sûreté personnelle, après avoir vu la santé des miens altérée par ce qui m'était personnel, je suis en droit d'aspirer au repos. Je me retirerai donc, mais ce n'est point par faiblesse. L'homme qui n'a tremblé ni devant les menaces de pillage, ni devant les menaces anonymes qu'on lui a plusieurs fois adressées, n'est pas un lâche... » Le ministre, après avoir dominé un effrayant tumulte, parla pendant deux heures et demie, démontrant les avantages que contenait pour la Belgique le traité des Dix-huit articles et l'urgente nécessité de saisir, pour constituer l'Etat, une occasion qui ne se présenterait plus. Les mâles arguments de l'orateur et ses exhortations patriotiques finirent par exciter l'émotion de l'assemblée entière. « Les tribunes, naguère turbulentes, dit un témoin, étaient comme fascinées. La Chambre, tout entière, écoutait avec la plus profonde attention ; et si le ministre fut quelquefois interrompu, ce ne fut que par des exclamations d'approbation et par des applaudissements. » Lorsque M. Lebeau se rassit, comme épuisé par ce dernier et victorieux effort, des applaudissements retentirent dans toutes les parties de la salle; ceux même qui étaient, tout à l'heure encore, les plus implacables adversaires du ministre, l'acclamaient maintenant avec émotion, avec enthousiasme. « Les hommes poussaient des acclamations, les femmes agitaient leurs mouchoirs, et les députés, même les adversaires les plus violents du ministre, s'élançaient au pied de la tribune pour le féliciter. Plusieurs membres versaient des larmes d'émotion. ». Le traité des Dix-huit articles fut accepté par le Congrès. Nous avons tenu à rappeler cette séance mémorable, parce qu'elle montre la puissance du talent de notre grand concitoyen. | Élevé par un oncle, curé à Hannut, il entra comme employé dans l'enregistrement. Cela ne l'empêcha pas de poursuivre ses études ; il fut reçu docteur en droit ; ' il s'établit à Liége, en 1822 et y fonda, en 1824, avec Paul Devaux et Charles Rogier, le Mathieu Laensberg; ce journal fit place ensuite au Politique, qui ne tarda pas à devenir un adversaire redoutable du gouvernement. La révolution opérée, le gouvernement provisoire, qui avait nommé Lebeau premier avocat général à Liége, le désigna pour faire partie de la commission chargée d'élaborer la Constitution. Sa ville natale l'envoya siéger au Congrès National avec M. Dautrebande. « On ne tarda pas à reconnaître en lui, non seulement un grand talent de parole et de sérieuses connaissances, mais aussi l'initiative, le coup d'oeil, la prévoyance et le courage du véritable homme d'Etat. » Le 27 mars 1831, il fut nommé ministre des Affaires Etran-gères. Lorsque vint la discussion du traité des Dix-huit articles, on ne peut se figurer la violence du débat, dit M. Juste, que nous suivons : « Des groupes menaçants entouraient le palais de la Nation, et on avait entendu un cri sinistre : Lebeau à la lanterne! lorsque, le 5 juillet, ce grand patriote demanda la parole. A grand'peine put-il dominer les murmures de l'assemblée frémis-sante et les furibondes clameurs des tribunes. Mais il déconcerta bientôt ses adversaires par la franchise et l'énergie de son exorde. « Je suis décidé, dit-il, qu'il y ait acceptation ou non des préliminaires, à quitter le ministère. Je suis en droit, après avoir pendant trois mois compromis ma sûreté personnelle, après avoir vu la santé des miens altérée par ce qui m'était personnel, je suis en droit d'aspirer au repos. Je me retirerai donc, mais ce n'est point par faiblesse. L'homme qui n'a tremblé ni devant les menaces de pillage, ni devant les menaces anonymes qu'on lui a plusieurs fois adressées, n'est pas un lâche... » Le ministre, après avoir dominé un effrayant tumulte, parla pendant deux heures et demie, démontrant les avantages que contenait pour la Belgique le traité des Dix-huit articles et l'urgente nécessité de saisir, pour constituer l'Etat, une occasion qui ne se présenterait plus. Les mâles arguments de l'orateur et ses exhortations patriotiques finirent par exciter l'émotion de l'assemblée entière. « Les tribunes, naguère turbulentes, dit un témoin, étaient comme fascinées. La Chambre, tout entière, écoutait avec la plus profonde attention ; et si le ministre fut quelquefois interrompu, ce ne fut que par des exclamations d'approbation et par des applaudissements. » Lorsque M. Lebeau se rassit, comme épuisé par ce dernier et victorieux effort, des applaudissements retentirent dans toutes les parties de la salle; ceux même qui étaient, tout à l'heure encore, les plus implacables adversaires du ministre, l'acclamaient maintenant avec émotion, avec enthousiasme. « Les hommes poussaient des acclamations, les femmes agitaient leurs mouchoirs, et les députés, même les adversaires les plus violents du ministre, s'élançaient au pied de la tribune pour le féliciter. Plusieurs membres versaient des larmes d'émotion. ». Le traité des Dix-huit articles fut accepté par le Congrès. Nous avons tenu à rappeler cette séance mémorable, parce qu'elle montre la puissance du talent de notre grand concitoyen. | ||
− | Ayant donné sa démission de ministre, malgré cet éclatant triomphe, il était retourné à Liége, quand on apprit que l'armée hollandaise allait reprendre les hostilités. Il fut appelé aussitôt auprès du roi Léopold. Grâce à ses démarches, à ses instances, la Belgique obtint l’intervention armée de la France. Il accepta, en 1832, de rentrer au ministère, avec le porte-feuille de la Justice, parce que les « difficultés étaient grandes, effrayantes, et rendaient presque impossible la composition de toute administration nouvelle ». (Séance du 24 novembre). Un mois après, l'armée française prenait la ville d'Anvers aux Hollandais. La dissolution des Chambres ayant eu lieu, M. Lebeau succomba à Huy, mais fut élu pour la seconde fois par Bruxelles. En 1834, il fut désigné pour remplir les fonctions de Gouverneur de la province de Namur. En 1839, il fut nommé ministre plénipotentiaire près de la Diète Germanique. L'année suivante, le Roi le chargea de former un nouveau Cabinet, le ministère de Theux ayant été renversé ; il ne resta qu'un an au pouvoir. En 1848, il redevint député de Huy. En présence des graves événements nés de la proclamation de l'Empire, en France, le 2 décembre 1852, le Roi lui demanda instamment de reprendre un portefeuille, mais il déclina cette offre; il publia peu après, la première livraison de l'ouvrage : La Belgique depuis 1847, destiné à combattre les préjugés, les erreurs que la presse réactionnaire propageait. « Se reportant aux jours glorieux de notre assemblée constituante, il évoquait les libertés politiques et religieuses dont elle avait doté la nation, et sommait les catholiques de déclarer s'il existait un autre pays où ils seraient plus heureux. Il les sommait de citer les libertés dont ils auraient été privés par les libéraux depuis 1847. Qui répondit à cet appel chaleureux ? L'archevêque de Malines. Oui, ce fut le primat de Belgique qui, dans son mandement publié le 19 mars 1853, à l'occasion de la majorité du duc de Brabant, disait : « La religion catholique, délivrée des entraves qui la gênaient auparavant, a joui (en Belgique) depuis vingt-deux ans de cette liberté et de cette indépendance que son divin fondateur lui a octroyées. Elle a pu donner pleinement l'essor à son activité... » En 1853, M. Lebeau publia les Lettres aux électeurs belges, dans lesquelles il passe en revue les événements antérieurs et les questions à l'ordre du jour. Le 12 novembre 1857, il fut nommé Ministre d'Etat. Il parla pour la dernière fois à la Chambre le 1er août 1862. M. Preud'homme, mort président émérite du tribunal, a raconté comment, retrouvant tout à coup l'énergie de sa jeunesse, il défendit avec chaleur, avec persistance, les intérêts méconnus de sa ville natale. « M. Lebeau, dit-il, était sous l'empire d'une vive et pro-fonde émotion. On eût dit qu'il avait le pressentiment que ces paroles étaient les dernières qu'il dût prononcer à la Chambre. Après avoir tout fait pour les grands intérêts du pays, il ne voulut pas terminer sa carrière sans avoir donné un dernier témoignage de son dévouement aux intérêts de sa ville natale. M. Lebeau demandait l'exécution complète des travaux de la canalisation de la Meuse depuis Namur jusqu'à Liège. Comprenant l'importance considérable de ce travail d'utilité publique, il mit une insistance particulière à en réclamer l'exécution immédiate. Quatre fois il prit la parole dans cette séance, et l'on dirait que, dans ces discours qui devaient être les derniers de sa carrière parlementaire, il eût voulu se peindre tout entier. Ils sont empreints de je ne sais quel sentiment mêlé de tristesse qui fut remarqué de tous ses collègues. Tout son passé politique lui revint à la mémoire. C'était la première fois qu'il l'invoquait au profit de sa ville natale. » Il se retira à Huy, après avoir annoncé son intention de renoncer à la vie politique. L'Association Libérale le nomma alors président d'honneur à vie. M. Chapelle, qui prit la parole en lui remettant le diplôme de ce titre, s'exprima comme suit : « En vous, Monsieur Lebeau, l'Association a eu à coeur d'honorer le glorieux vétéran de 1830, l'homme d'Etat qui, s'inspirant alors d'une grande pensée, l'abritant sous l'autorité de son talent, a le Plus puissamment contribué, au milieu des débris épars que la révolution avait jetés sur notre sol, à élever le magnifique édifice constitutionnel auquel nous devons trente-quatre années de paix, de prospérité et de grandeur. C'est une dette de coeur qu'elle a tenu à vous payer pour vos services passés. » M. Lebeau mourut le 19 mars 1865, à l'âge de 72 ans. Une foule immense et émue assista à ses funérailles. | + | Ayant donné sa démission de ministre, malgré cet éclatant triomphe, il était retourné à Liége, quand on apprit que l'armée hollandaise allait reprendre les hostilités. Il fut appelé aussitôt auprès du roi Léopold. Grâce à ses démarches, à ses instances, la Belgique obtint l’intervention armée de la France. Il accepta, en 1832, de rentrer au ministère, avec le porte-feuille de la Justice, parce que les « difficultés étaient grandes, effrayantes, et rendaient presque impossible la composition de toute administration nouvelle ». (Séance du 24 novembre). Un mois après, l'armée française prenait la ville d'Anvers aux Hollandais. La dissolution des Chambres ayant eu lieu, M. Lebeau succomba à Huy, mais fut élu pour la seconde fois par Bruxelles. En 1834, il fut désigné pour remplir les fonctions de Gouverneur de la province de Namur. En 1839, il fut nommé ministre plénipotentiaire près de la Diète Germanique. L'année suivante, le Roi le chargea de former un nouveau Cabinet, le ministère de Theux ayant été renversé ; il ne resta qu'un an au pouvoir. En 1848, il redevint député de Huy. En présence des graves événements nés de la proclamation de l'Empire, en France, le 2 décembre 1852, le Roi lui demanda instamment de reprendre un portefeuille, mais il déclina cette offre; il publia peu après, la première livraison de l'ouvrage : La Belgique depuis 1847, destiné à combattre les préjugés, les erreurs que la presse réactionnaire propageait. « Se reportant aux jours glorieux de notre assemblée constituante, il évoquait les libertés politiques et religieuses dont elle avait doté la nation, et sommait les catholiques de déclarer s'il existait un autre pays où ils seraient plus heureux. Il les sommait de citer les libertés dont ils auraient été privés par les libéraux depuis 1847. Qui répondit à cet appel chaleureux ? L'archevêque de Malines. Oui, ce fut le primat de Belgique qui, dans son mandement publié le 19 mars 1853, à l'occasion de la majorité du duc de Brabant, disait : « La religion catholique, délivrée des entraves qui la gênaient auparavant, a joui (en Belgique) depuis vingt-deux ans de cette liberté et de cette indépendance que son divin fondateur lui a octroyées. Elle a pu donner pleinement l'essor à son activité... » En 1853, M. Lebeau publia les Lettres aux électeurs belges, dans lesquelles il passe en revue les événements antérieurs et les questions à l'ordre du jour. Le 12 novembre 1857, il fut nommé Ministre d'Etat. Il parla pour la dernière fois à la Chambre le 1er août 1862. M. Preud'homme, mort président émérite du tribunal, a raconté comment, retrouvant tout à coup l'énergie de sa jeunesse, il défendit avec chaleur, avec persistance, les intérêts méconnus de sa ville natale. « M. Lebeau, dit-il, était sous l'empire d'une vive et pro-fonde émotion. On eût dit qu'il avait le pressentiment que ces paroles étaient les dernières qu'il dût prononcer à la Chambre. Après avoir tout fait pour les grands intérêts du pays, il ne voulut pas terminer sa carrière sans avoir donné un dernier témoignage de son dévouement aux intérêts de sa ville natale. M. Lebeau demandait l'exécution complète des travaux de la canalisation de la Meuse depuis Namur jusqu'à Liège. Comprenant l'importance considérable de ce travail d'utilité publique, il mit une insistance particulière à en réclamer l'exécution immédiate. Quatre fois il prit la parole dans cette séance, et l'on dirait que, dans ces discours qui devaient être les derniers de sa carrière parlementaire, il eût voulu se peindre tout entier. Ils sont empreints de je ne sais quel sentiment mêlé de tristesse qui fut remarqué de tous ses collègues. Tout son passé politique lui revint à la mémoire. C'était la première fois qu'il l'invoquait au profit de sa ville natale. » Il se retira à Huy, après avoir annoncé son intention de renoncer à la vie politique. L'Association Libérale le nomma alors président d'honneur à vie. M. Chapelle, qui prit la parole en lui remettant le diplôme de ce titre, s'exprima comme suit : « En vous, Monsieur Lebeau, l'Association a eu à coeur d'honorer le glorieux vétéran de 1830, l'homme d'Etat qui, s'inspirant alors d'une grande pensée, l'abritant sous l'autorité de son talent, a le Plus puissamment contribué, au milieu des débris épars que la révolution avait jetés sur notre sol, à élever le magnifique édifice constitutionnel auquel nous devons trente-quatre années de paix, de prospérité et de grandeur. C'est une dette de coeur qu'elle a tenu à vous payer pour vos services passés. » '''M. Lebeau mourut le 19 mars 1865, à l'âge de 72 ans'''. Une foule immense et émue assista à ses funérailles. |
===Statue de Joseph Lebeau=== | ===Statue de Joseph Lebeau=== | ||
− | Une souscription publique fut ouverte pour lui élever une statue, dont l'inauguration eut lieu le 16 août 1869. La statue du puissant orateur est l'oeuvre de M. Geefs. M. Vierset-Godin fit les plans du piédestal. Elle a coûté environ 40.000 francs. En raison des souvenirs qu'elle évoque et de la part que le pays a prise à son érection, elle revêt le caractère d'un monument national. Le 17 mai 1897, le Conseil communal a adopté un nouveau plan d'alignement pour l'avenue Godin-Parnajon, plan pré-voyant l'élargissement notable de cette avenue et la suppression du fossé qui le longeait. La partie à incorporer à la voie publique, mesurant 1366 mètres carrés, devait être cédée à la voirie par M. Léopold Godin, à raison de 20 francs le mètre, mais ce dernier, en faisant don à la ville de la prairie du Neufmoustier, — baptisée place Pierre l'Ermite, —a déclaré abandonner gratuitement le terrain en question. | + | [[Fichier:Monument Lebeau2.jpg|vignette|gauche]] |
− | + | Une souscription publique fut ouverte pour lui élever une statue, dont l'inauguration eut lieu le 16 août 1869. La statue du puissant orateur est l'oeuvre de M. Geefs. M. Vierset-Godin fit les plans du piédestal. Elle a coûté environ 40.000 francs. En raison des souvenirs qu'elle évoque et de la part que le pays a prise à son érection, elle revêt le caractère d'un monument national. Le 17 mai 1897, le Conseil communal a adopté un nouveau plan d'alignement pour l'avenue Godin-Parnajon, plan pré-voyant l'élargissement notable de cette avenue et la suppression du fossé qui le longeait. La partie à incorporer à la voie publique, mesurant 1366 mètres carrés, devait être cédée à la voirie par M. Léopold Godin, à raison de 20 francs le mètre, mais ce dernier, en faisant don à la ville de la prairie du Neufmoustier, — baptisée place Pierre l'Ermite, —a déclaré abandonner gratuitement le terrain en question. | |
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Version actuelle en date du 26 mars 2016 à 13:09
Joseph Lebeau, né à Huy le 3 janvier 1794 et mort à Huy, le 19 mars 1865 est un homme politique belge, de tendance libérale, qui fut de facto le chef de l'exécutif du royaume de Belgique du 28 mars 1831 au 24 juillet 1831.
Sommaire
Biographie
L'activiste libéral de Liège
Joseph Lebeau est né à Huy en 1794. Son éducation est confiée à un de ses oncles maternels, qui est prêtre. Malgré cette éducation, il s'inscrit en 1819 à la loge maçonnique de Huy, « les Amis de la parfaite intelligence ». En décembre 1819, il passe son doctorat en droit à l'université de Liège. Il commence alors à se passionner pour la politique, notamment pour les discours de Manuel et de Royer-Collard, rapportés dans les journaux.
Il fonde alors à Liège avec Charles Rogier, Firmin Rogier et Paul Devaux un journal libéral, le Matthieu Lansbergh, qui devient ensuite le Politique. Peu à peu, ce journal en vient à prôner l'union des catholiques et des libéraux contre Guillaume Ier des Pays-Bas. À cette époque, il écrit aussi un livre, Observations sur le pouvoir royal, qui défend la limitation des pouvoirs du souverain.
Député au Congrès national
À la révolution de 1830, Charles Rogier part pour Bruxelles où il devient ministre du gouvernement provisoire. Le 30 septembre, Lebeau est nommé avocat général à Liège, à la place de Charles Nicolas Joseph de Warzée d’Hermalle. Dans le courant du mois d'octobre, il soutient le projet de donner le trône de Belgique au prince d'Orange1. En novembre, il est élu député au Congrès national.
Il prend parti en janvier 1831 contre la candidature de Louis d'Orléans au trône de Belgique. Il a en effet compris que le soutien du Royaume-Uni est indispensable pour pérenniser l'indépendance de la Belgique et que cette puissance n'accepterait qu'elle prenne pour souverain le fils du roi des Français. Il soutient donc Auguste de Leuchtenberg. La majorité se rallie cependant à Louis d'Orléans, mais le roi Louis-Philippe refuse l'offre.
Premier Ministre
C'est alors qu'Étienne de Sauvage, nommé par Érasme-Louis Surlet de Chokier pour former un gouvernement, fait appel à Joseph Lebeau. Celui-ci accepte à condition que Paul Devaux soit également membre du gouvernement. Cette proposition se heurte dans un premier temps à la volonté de Surlet de Chokier. En effet, celui-ci, persistant à croire que le soutien de Paris seul était nécessaire à la jeune Belgique, ne voulait pas de deux partisans des thèses opposées dans son gouvernement. Pourtant, de Sauvage réussit à le convaincre et forme son exécutif. Il est composé de :
- Étienne de Sauvage, ministre de l'Intérieur,
- Charles de Brouckère, ministre des Finances (remplacé par Auguste Duvivier le 30 mai),
- Antoine Barthélemy, ministre de la Justice,
- le colonel Constantin d'Hane-Steenhuyse, ministre de la Guerre (remplacé par Amédée de Failly le 13 mai),
- Joseph Lebeau, ministre des Affaires étrangères,
- Paul Devaux, ministre sans portefeuille.
Ce gouvernement n'a officiellement pas de chef, mais Joseph Lebeau en assure la direction de facto. Tout d'abord, il entreprend de trouver un roi à la Belgique. Paul Devaux lui suggère la candidature de Léopold de Saxe-Cobourg et Gotha, veuf de la princesse de Galles et oncle maternel de l'héritière du trône britannique (la future reine Victoria), et il se rallie immédiatement à ce choix. Lord Palmerston soutient cette idée et fait savoir à Lebeau que dans cette hypothèse, la Belgique pourrait récupérer le Luxembourg, que lui refusaient les protocoles de Londres du 20 janvier 1831.
Reste à convaincre le prince lui-même. Celui-ci accepte à condition que la Belgique trouve un arrangement avec les grandes puissances européennes. Il apporte néanmoins son soutien à la diplomatie belge dans ses négociations avec la conférence de Londres, qui accepte finalement que la Belgique puisse acheter le Luxembourg. Jean-Baptiste Nothomb imagine de son côté un stratagème pour récupérer également le Limbourg. En effet, les protocoles de Londres du 20 janvier stipulaient que les Pays-Bas retrouveraient leurs frontières d'avant 1790. Or, à cette date, de nombreuses enclaves existaient à l'intérieur des Provinces-Unies, que Nothomb espérait pouvoir échanger contre le Limbourg. Le 26 juin 1831, la conférence de Londres édicte le Traité des XVIII articles, qui permet à la fois le rachat du Luxembourg et l'échange du Limbourg.
Le prince Léopold déclare qu'il accepte le trône de Belgique si le Congrès national ratifie ce traité. Joseph Lebeau doit alors utiliser tous ses talents d'orateur pour défendre le texte devant le Congrès, radicalement opposé à toute négociation concernant l'intégrité du territoire belge. Pour le convaincre, il annonce même solennellement qu'il quitterait le pouvoir une fois le traité ratifié. Il reçoit l'appui de certains députés, tel Félix de Mûelenare. Les débats, qui durent plusieurs jours, s'achèvent le 9 juillet avec la ratification du traité par 126 voix contre 70.
Joseph Lebeau part alors pour Londres proposer officiellement la couronne au prince Léopold. Après son intronisation, celui-ci demande à Lebeau de constituer un gouvernement. L'homme refuse, tenu par son engagement vis-à-vis du Congrès, et il recommande au roi Félix de Mûelenare. Il retrouve à Liège son poste d'avocat général.
La campagne des Dix Jours
Le 2 août, le roi, alors à Liège pour sa Joyeuse Entrée, apprend que les troupes hollandaises marchent sur la Belgique. Il réalise que l'appui de la France et du Royaume-Uni est indispensable pour résister, mais ne peut lui-même faire appel aux puissances étrangères en vertu de la constitution (article 121). Comme alors le Congrès est dissous et que les nouvelles chambres ne sont pas encore élues, il fait appel à Joseph Lebeau, qui n'est même plus ministre, pour rédiger une demande d'aide à Londres et à Paris. L'homme politique s'exécute et accepte ensuite de devenir ministre sans portefeuille.
L'attaque hollandaise entraîne des défaites locales et le recul général des troupes belges. Voulant éviter de connaître les risques d'une guerre de rues comme en septembre 1830, les Hollandais contournent la capitale par l'est, mais l'arrivée de l'armée française appelée par le roi Léopold Ier et Lebeau les contraint à se retirer dans la place forte d'Anvers. Dès la fin des hostilités, à la prise d'Anvers, Lebeau démissionne et retourne à Liège.
Il est à nouveau ministre dans le gouvernement d'Albert Goblet d'Alviella (ministre de la Justice, 1832-1834). Il est ensuite gouverneur de la province de Namur, tout en restant député. Il donne sa démission en tant que gouverneur peu après la signature du Traité des XXIV articles par Guillaume Ier des Pays-Bas, car ses relations avec le chef de cabinet Barthélémy de Theux de Meylandt étaient devenues conflictuelles. Celui-ci le nomma ambassadeur de Belgique auprès de la Diète de Francfort.
Le premier gouvernenement libéral homogène
Il est rappelé au pouvoir par le roi en 1840 et met en place le premier gouvernement libéral homogène (Mathieu Leclercq à la Justice, Édouard Mercier aux Finances, Charles Liedts à l'Intérieur, Charles Rogier aux Travaux publics et aux Beaux-Arts et le général Gérard Buzen à la Guerre). Ce gouvernement est marqué par des dissensions entre le roi et le chef de cabinet et surtout par l'opposition du Sénat aux mains des catholiques. Ceci pousse finalement Lebeau à remettre sa démission un an à peine après la constitution du cabinet.
Il refuse en 1851 l'offre du roi de revenir au pouvoir. Il renonce à son mandat de député en 1863. Il retourne à Huy après les élections de 1864 et y meurt en mars 1865.
Biographie d'après René Dubois, publié dans les Rues de Huy en 1922
Au commencement de l'avenue Godin-Parnajon, s'élève la statue de Joseph Lebeau, une de nos illustrations nationales les plus pures. Arrêtons-nous avec respect devant cette grande figure et rappelons à la génération actuelle ce que fit pour son pays cet homme d'Etat éminent, probe et désintéressé, cet orateur à la voix puissante et chaleureuse. « Publiciste, orateur, législateur, ministre, M. Lebeau, dit Th. Juste, se distingua dans toutes les positions où il fut appelé. Cependant, reconnaissons-le, son vrai, son incontestable titre de gloire, c'est la part considérable, exceptionnelle même, qu'il prit à la fondation du royaume de Belgique. D'autres hommes, remarquables à divers titres, contribuèrent également à faire aboutir la révolution de 1830. Mais, sans vouloir diminuer le mérite de leur intervention, disons que M. Lebeau possède des droits particuliers à la gratitude de la postérité. Il prit l'initiative, et il assuma la glorieuse responsabilité des actes mémorables qui prévinrent l'anéantissement de la Belgique, redevenue indépendante. Cette grande mission noblement remplie, avec un heureux mélange d'audace et de prudence, avec un rare désintéressement, avec une abnégation admirable, doit assigner à M. Lebeau une place éminente dans l'histoire contemporaine. » Lebeau, Jean-Louis- Joseph , naquit à Huy le 3 janvier 1794, dans une maison de la Grand'Place, vers la rue des Brasseurs et occupée actuellement par M. Delhauteur. (On devrait bien y placer un écriteau rappelant ce fait).
Élevé par un oncle, curé à Hannut, il entra comme employé dans l'enregistrement. Cela ne l'empêcha pas de poursuivre ses études ; il fut reçu docteur en droit ; ' il s'établit à Liége, en 1822 et y fonda, en 1824, avec Paul Devaux et Charles Rogier, le Mathieu Laensberg; ce journal fit place ensuite au Politique, qui ne tarda pas à devenir un adversaire redoutable du gouvernement. La révolution opérée, le gouvernement provisoire, qui avait nommé Lebeau premier avocat général à Liége, le désigna pour faire partie de la commission chargée d'élaborer la Constitution. Sa ville natale l'envoya siéger au Congrès National avec M. Dautrebande. « On ne tarda pas à reconnaître en lui, non seulement un grand talent de parole et de sérieuses connaissances, mais aussi l'initiative, le coup d'oeil, la prévoyance et le courage du véritable homme d'Etat. » Le 27 mars 1831, il fut nommé ministre des Affaires Etran-gères. Lorsque vint la discussion du traité des Dix-huit articles, on ne peut se figurer la violence du débat, dit M. Juste, que nous suivons : « Des groupes menaçants entouraient le palais de la Nation, et on avait entendu un cri sinistre : Lebeau à la lanterne! lorsque, le 5 juillet, ce grand patriote demanda la parole. A grand'peine put-il dominer les murmures de l'assemblée frémis-sante et les furibondes clameurs des tribunes. Mais il déconcerta bientôt ses adversaires par la franchise et l'énergie de son exorde. « Je suis décidé, dit-il, qu'il y ait acceptation ou non des préliminaires, à quitter le ministère. Je suis en droit, après avoir pendant trois mois compromis ma sûreté personnelle, après avoir vu la santé des miens altérée par ce qui m'était personnel, je suis en droit d'aspirer au repos. Je me retirerai donc, mais ce n'est point par faiblesse. L'homme qui n'a tremblé ni devant les menaces de pillage, ni devant les menaces anonymes qu'on lui a plusieurs fois adressées, n'est pas un lâche... » Le ministre, après avoir dominé un effrayant tumulte, parla pendant deux heures et demie, démontrant les avantages que contenait pour la Belgique le traité des Dix-huit articles et l'urgente nécessité de saisir, pour constituer l'Etat, une occasion qui ne se présenterait plus. Les mâles arguments de l'orateur et ses exhortations patriotiques finirent par exciter l'émotion de l'assemblée entière. « Les tribunes, naguère turbulentes, dit un témoin, étaient comme fascinées. La Chambre, tout entière, écoutait avec la plus profonde attention ; et si le ministre fut quelquefois interrompu, ce ne fut que par des exclamations d'approbation et par des applaudissements. » Lorsque M. Lebeau se rassit, comme épuisé par ce dernier et victorieux effort, des applaudissements retentirent dans toutes les parties de la salle; ceux même qui étaient, tout à l'heure encore, les plus implacables adversaires du ministre, l'acclamaient maintenant avec émotion, avec enthousiasme. « Les hommes poussaient des acclamations, les femmes agitaient leurs mouchoirs, et les députés, même les adversaires les plus violents du ministre, s'élançaient au pied de la tribune pour le féliciter. Plusieurs membres versaient des larmes d'émotion. ». Le traité des Dix-huit articles fut accepté par le Congrès. Nous avons tenu à rappeler cette séance mémorable, parce qu'elle montre la puissance du talent de notre grand concitoyen.
Ayant donné sa démission de ministre, malgré cet éclatant triomphe, il était retourné à Liége, quand on apprit que l'armée hollandaise allait reprendre les hostilités. Il fut appelé aussitôt auprès du roi Léopold. Grâce à ses démarches, à ses instances, la Belgique obtint l’intervention armée de la France. Il accepta, en 1832, de rentrer au ministère, avec le porte-feuille de la Justice, parce que les « difficultés étaient grandes, effrayantes, et rendaient presque impossible la composition de toute administration nouvelle ». (Séance du 24 novembre). Un mois après, l'armée française prenait la ville d'Anvers aux Hollandais. La dissolution des Chambres ayant eu lieu, M. Lebeau succomba à Huy, mais fut élu pour la seconde fois par Bruxelles. En 1834, il fut désigné pour remplir les fonctions de Gouverneur de la province de Namur. En 1839, il fut nommé ministre plénipotentiaire près de la Diète Germanique. L'année suivante, le Roi le chargea de former un nouveau Cabinet, le ministère de Theux ayant été renversé ; il ne resta qu'un an au pouvoir. En 1848, il redevint député de Huy. En présence des graves événements nés de la proclamation de l'Empire, en France, le 2 décembre 1852, le Roi lui demanda instamment de reprendre un portefeuille, mais il déclina cette offre; il publia peu après, la première livraison de l'ouvrage : La Belgique depuis 1847, destiné à combattre les préjugés, les erreurs que la presse réactionnaire propageait. « Se reportant aux jours glorieux de notre assemblée constituante, il évoquait les libertés politiques et religieuses dont elle avait doté la nation, et sommait les catholiques de déclarer s'il existait un autre pays où ils seraient plus heureux. Il les sommait de citer les libertés dont ils auraient été privés par les libéraux depuis 1847. Qui répondit à cet appel chaleureux ? L'archevêque de Malines. Oui, ce fut le primat de Belgique qui, dans son mandement publié le 19 mars 1853, à l'occasion de la majorité du duc de Brabant, disait : « La religion catholique, délivrée des entraves qui la gênaient auparavant, a joui (en Belgique) depuis vingt-deux ans de cette liberté et de cette indépendance que son divin fondateur lui a octroyées. Elle a pu donner pleinement l'essor à son activité... » En 1853, M. Lebeau publia les Lettres aux électeurs belges, dans lesquelles il passe en revue les événements antérieurs et les questions à l'ordre du jour. Le 12 novembre 1857, il fut nommé Ministre d'Etat. Il parla pour la dernière fois à la Chambre le 1er août 1862. M. Preud'homme, mort président émérite du tribunal, a raconté comment, retrouvant tout à coup l'énergie de sa jeunesse, il défendit avec chaleur, avec persistance, les intérêts méconnus de sa ville natale. « M. Lebeau, dit-il, était sous l'empire d'une vive et pro-fonde émotion. On eût dit qu'il avait le pressentiment que ces paroles étaient les dernières qu'il dût prononcer à la Chambre. Après avoir tout fait pour les grands intérêts du pays, il ne voulut pas terminer sa carrière sans avoir donné un dernier témoignage de son dévouement aux intérêts de sa ville natale. M. Lebeau demandait l'exécution complète des travaux de la canalisation de la Meuse depuis Namur jusqu'à Liège. Comprenant l'importance considérable de ce travail d'utilité publique, il mit une insistance particulière à en réclamer l'exécution immédiate. Quatre fois il prit la parole dans cette séance, et l'on dirait que, dans ces discours qui devaient être les derniers de sa carrière parlementaire, il eût voulu se peindre tout entier. Ils sont empreints de je ne sais quel sentiment mêlé de tristesse qui fut remarqué de tous ses collègues. Tout son passé politique lui revint à la mémoire. C'était la première fois qu'il l'invoquait au profit de sa ville natale. » Il se retira à Huy, après avoir annoncé son intention de renoncer à la vie politique. L'Association Libérale le nomma alors président d'honneur à vie. M. Chapelle, qui prit la parole en lui remettant le diplôme de ce titre, s'exprima comme suit : « En vous, Monsieur Lebeau, l'Association a eu à coeur d'honorer le glorieux vétéran de 1830, l'homme d'Etat qui, s'inspirant alors d'une grande pensée, l'abritant sous l'autorité de son talent, a le Plus puissamment contribué, au milieu des débris épars que la révolution avait jetés sur notre sol, à élever le magnifique édifice constitutionnel auquel nous devons trente-quatre années de paix, de prospérité et de grandeur. C'est une dette de coeur qu'elle a tenu à vous payer pour vos services passés. » M. Lebeau mourut le 19 mars 1865, à l'âge de 72 ans. Une foule immense et émue assista à ses funérailles.
Statue de Joseph Lebeau
Une souscription publique fut ouverte pour lui élever une statue, dont l'inauguration eut lieu le 16 août 1869. La statue du puissant orateur est l'oeuvre de M. Geefs. M. Vierset-Godin fit les plans du piédestal. Elle a coûté environ 40.000 francs. En raison des souvenirs qu'elle évoque et de la part que le pays a prise à son érection, elle revêt le caractère d'un monument national. Le 17 mai 1897, le Conseil communal a adopté un nouveau plan d'alignement pour l'avenue Godin-Parnajon, plan pré-voyant l'élargissement notable de cette avenue et la suppression du fossé qui le longeait. La partie à incorporer à la voie publique, mesurant 1366 mètres carrés, devait être cédée à la voirie par M. Léopold Godin, à raison de 20 francs le mètre, mais ce dernier, en faisant don à la ville de la prairie du Neufmoustier, — baptisée place Pierre l'Ermite, —a déclaré abandonner gratuitement le terrain en question.
Galerie
Hommages
- À Bruxelles, la rue Joseph Lebeau porte son nom depuis 1891.
- À Liège, la rue Lebeau fait face à la rue Paul Devaux ; les deux rues sont adjacentes à l'avenue Rogier.
- À Huy, une statue de Joseph Lebeau, par Guillaume Geefs est installée en 1868, à l'extrémité de l'avenue Joseph Lebeau.
Bibliographie
Jean Bartelous, Nos Premiers Ministres, de Léopold Ier à Albert Ier, Bruxelles, J.M. Collet, 1983
Carlo Bronne, Joseph Lebeau, Bruxelles, La Renaissance du livre, coll. « Notre passé », 1944, 114 p.
Fernand Daxhelet, Joseph Lebeau, Bruxelles, Charles Dessart, 1945
Théodore Juste, Joseph Lebeau d'après des documents inédits, Bruxelles, C. Muquardt, 1866
--RV (CCAH) Admin WikiHuy (discussion) 21 mai 2014 à 19:42 (CEST)