LA GROTTE DU MONT FALISE : Différence entre versions

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Version actuelle en date du 21 avril 2023 à 21:50


Photo de l'entrée de la grotte du Mont-Falise à Huy

PREAMBULE

La précieuse source que nous avons pu consulter et dont le titre complet est repris ci-dessous dans la rubrique SOURCE, comporte, comme tout travail de mémoire universitaire, de nombreuses pages, des notes, des tableaux et des illustrations. Nous avons choisi le chapitre consacré à la GROTTE DU MONT FALHIZE et nous l'avons résumé ici en empruntant la classification des rubriques à l'auteure Isabelle ERNOTTE.

Notre but est seulement de montrer au public que l'on peut découvrir toute la vie antérieure des belles montagnes qui entourent la ville de Huy en fouillant scientifiquement les "trous" des rochers qui ont servi, à d'autres époques, d'abris, de cachettes et même d'habitations et de cimetières, non seulement à des animaux sauvages, mais aussi à certains de nos ancêtres.

Le lecteur en quête de tous les détails est évidemment invité à se procurer et à lire le document original.

                                              NOTE: l'auteure du mémoire a décidé d'adopter l'orthographe FALHIZE au lieu du FALISE actuel.

INTRODUCTION

La grotte de FALHIZE a été dénommée ainsi par Julien FRAIPONT (1897) car elle s'ouvre sur le versant nord d'une hauteur appelée "Mont Falhize" à une dizaine de mètres sur le plateau.

SITUATION

La grotte est située au lieu-dit "Hart-du-Gibet" (plus tard =Haut du Gibet), rive gauche de la Meuse, sur un versant faisant partie de la rive gauche du bassin de la MEHAIGNE, à 650 m au nord-est de la Meuse et à 2 km au nord du centre de HUY, à environ 1200 m à l'est de la Mehaigne. La grotte s'ouvre sur le versant nord du mont Falhize, à environ 10 m en dessous du plateau, en face de la levée de terre qui barre l'éperon. Son entrée surplombe la caserne Lieutenant BINAME à Antheit.

Remarque: En 1890, Julien FRAIPONT a situé la grotte à Antheit, mais elle est, en réalité, dans l'entité de HUY et non dans celle de WANZE. Jules HAEK en 1958 parlait encore de la Grotte du Mont-Falise à "Antheit". Ce fut Marguerite ULRIX-CLOSSET qui, la première, en 1975, en fit une grotte bien hutoise.

GEOLOGIE

D'après Marguerite ULRIX-CLOSSET, la grotte s'est formée dans un calcaire carbonifère Viséen


LES FOUILLES

1. JULIEN FRAIPONT

Ce fut lui qui réalisa en 1897 la première publication d'une fouille de 1890. Il pratiqua une tranchée dans toute l'épaisseur des dépôts meubles, de l'entrée jusqu'au fond de la cavité, rejetant les déblais sur la terrasse. Ce sont ceux-ci qui seront fouillés par Jules HAECK en 1963. Dimensions de la grotte: un couloir de 2 à 3 m de longueur s'ouvre brusquement à gauche dans une salle arrondie de 5 à 6 m de diamètre.

2.ERNEST DOUDOU

Il fit, en 1902, quelques recherches avec Lambert GEORGIEN, à l'arrière de la grotte et ils y ont recueilli des ossements broyés de taxons indéterminables, tout en insistant sur le fait qu'il y a encore probablement de nombreuses pièces lithiques néolithiques à découvrir.

3.JULES HAECK

Il entreprit une 3ème et dernière campagne de fouilles en mars 1958 avec Guy et Joseph DESTEXHE sur la terrasse dans laquelle 2 tranchées ont été réalisées. Ils ont entamé les fouilles par le tamisage des déblais des anciennes fouilles. Ensuite, 2 tranchées ont été creusées, atteignant la roche-mère. D'abord une jusqu'à l'humus sous les déblais, où ils ont trouvé des ossements humains et animaux. La seconde partait de la grotte et traversait toute la largeur de la terrasse. A 3m50 de la falaise, ils ont découvert une cuvette de 5m sur 2, dans laquelle ils ont répertorié des ossements humains, des vestiges lithiques et céramiques de différentes époques.

DECOUVERTES

1. DANS LA GROTTE

Grâce à sa tranchée dans la grotte, en 1897, Julien FRAIPONT a constaté que la première couche d'éboulis et de terre végétale contenait essentiellement des ossements humains, des restes de faune et des productions lithiques du Néolithique. En creusant plus profond, il a découvert des ossements humains probablement déposés là par des hommes de l'époque afin d'y enterrer leurs morts.

Remarques:

-les ossements humains étaient brisés.

-les ossements fauniques étaient également brisés, et provenaient de moutons, de boeufs, de chevaux mais aussi de la couche antérieure paléolithique tels que des débris d'hyènes, d'ours et de boeufs.

-comme objets: 1 demi-hache polie, 2 pointes de flèches, 1 grattoir, 14 lames, 15 éclats de silex, 8 morceaux de poterie néolithiques (=dépôt funéraire?).

Quant à la deuxième couche, composée d'une terre brun-grisâtre d'épaisseur variable, elle contenait encore quelques restes humains provenant de la première couche. Et aussi des ossements animaux brisés et fracturés intentionnellement pour en extraire la moelle, ainsi que d'autres qui semblaient avoir été rongés ou fracturés par des animaux tels des hyènes. On répertoriait des os de rhinocéros, de mammouths, de chevaux, d'ours et d'hyènes de cavernes. D'un point de vue lithique, des instruments en silex de type "Chelléen et Moustérien", comme 1 pointe, 1 ou plusieurs racloirs, 1 "coup-de-poing" chelléen, 1 pointe en amande de type de St-Acheul, 2 pointes de flèches néolithiques taillées sur les deux faces.

Remarque: parmi les ossements humains figurait un grand nombre de fragments de crânes, des morceaux de mâchoires, de bassins, de colonnes vertébrales, de cages thoraciques, de bras, de jambes..

La troisième couche était composée de terre jaune sableuse stérile.


2.SUR LA TERRASSE

-Déblais des anciennes fouilles: couche de 50 à 70 cm d'épaisseur. Y furent découverts 7 éclats de silex, 1 éclat de hache polie, 12 tessons de poteries préhistoriques et protohistoriques, 40 tessons du Moyen-Âge, 1 squelette de chien moderne, 2 mâchoires inférieures de blaireaux, quelques ossements d'animaux modernes.

-Ancienne couche d'humus de 15 à 20 cm: s'y trouvaient 32 tessons de poteries du Moyen-âge, 2 tessons de poteries d'époque romaine, quelques ossements d'animaux (mélangés).

-Couche de terre grise de 70 cm avec de petits blocs de calcaire: à sa base, une cuvette de terre noirâtre mêlée à du charbon de bois, avec les restes humains de 8 individus accompagnés de tessons de l'âge du Fer.

-Couche de terre grise de 5 à 20 cm ne contenant aucune trace de charbon de bois, mais bien quelques silex néolithiques.

-Couche brun-noirâtre de 20 à 25 cm avec des fragments de calcaire et quelques silex du Paléolithique supérieur.

-Couche brun-clair de 50 cm, comprenant des cailloux roulés, des fragments de calcaire avec les arêtes usées ainsi que des silex taillés du Paléolithique moyen.

Coupe dans la terrasse de la grotte du Mont-Falise, extrait de "La grotte du M.F." par J.Haeck in Bull.SOC.Belge Anthropol.-Préhist/74 p.44

INVENTAIRES ANTHROPOLOGIQUES

1.JULIEN FRAIPONT

Ce chercheur a établi 2 inventaires d'ossements humains, l'un en 1897 et l'autre en 1900, présentés en 7 pages détaillées. L'auteure remarque que les déménagements et dispersions des collections ont entraîné la perte de certaines pièces, comme, par exemple, l'ensemble des arcades dentaires supérieures et inférieures. Malgré les nombreux fragments recueillis, aucun crâne entier n'a pu être reconstitué.

2.JULIEN HAECK, ANALYSES PAR PAUL JANSSENS-1964

Les ossements récupérés sur la terrasse en 1958 étaient très fragmentés , quasiment aucun ossement entier, excepté des métacarpes et des métatarses, n'a été retrouvé. L'inventaire détaillé comporte 5 pages. Paul Janssens y décrit quelques lésions dentaires, abrasions, kystes, carie, arthrose de maxillaire. Il signale aussi 4 altérations pathologiques: des becs-de-perroquet, des corps vertébraux soudés, un fragment de diaphyse fémorale, des excroissances à une rotule.

3.MATERIEL LITHIQUE PAR PERIODE

Inventaire de Jules HAECK en comparaison avec les restes lithiques des fouilles de Julien FRAIPONT. il y a du Paléolithique moyen, du Paléolithique supérieur, du Néolithique, de l'Âge du Fer, de l'Epoque romaine et du Moyen Âge. Rapport détaillé des armes, des outils, des poteries.


4.INVENTAIRE FAUNIQUE

Fait par Jules HAECK en 1964. Dents et ossements d'animaux, dont certains indéterminés ou mélangés. Mouton, boeuf, lapin, chien, cheval, blaireau, cerf, chevreuil, rhinocéros, mammouth, cheval, ours et hyène.

Les inventaires sont suivis de 5 pages de dessins avec numéros et légendes.

ANALYSES ANTHROPOLOGIQUES

Nombre d'individus:

Selon Julien FRAIPONT-1900 dans la GROTTE: 1 vieillard, 4 adultes et 1 enfant.

Selon l'auteure: 1 vieillard, 4 ou 5 adultes, 2 enfants, 1 adolescent.

Selon Jules HAECK-1954 sur la TERRASSE: 1 homme adulte et 3 femmes adultes, de moins de 40 ans, 1 homme entre 40 et 50 ans, 1 adolescent de 19 ans, 2 enfants de 11 et 5 ou 6 ans.


INTERPRETATIONS

1.JULIEN FRAIPONT

D'après lui, ce serait un lieu de sépulture néolithique et ossuaire. Il conclut dans un premier temps que la grotte a été habitée par une première population du Quaternaire inférieur, plus précisément de l'Âge du Mammouth. La grotte a probablement servi de refuge à plusieurs reprises et à de longs intervalles au Paléolithique. Dans un deuxième temps, des Néolithiques se seraient servis de cet abri naturel pour y séjourner temporairement et y enterrer leurs morts, voire d'y préparer des repas funéraires. Il signale également que la grotte aurait pu servir au Moyen Âge comme refuge pour les opposants politiques ou a servi pour recueillir les ossements des suppliciés pendus.

2.ERNEST DOUDOU

La 2ème campagne de fouilles a révélé, sous la voûte effondrée, des éclats de silex et des fragments d'ossements indéterminés. D'après lui, des Néolithiques ont bien séjourné sur la colline et à proximité de la caverne. Il conclut également que les abords du site ont été habités par des Romains, vu la découverte de céramique au-dessus des pierrailles environnantes.

3.JULIEN HAECK et PAUL JANSSENS

La 3ème campagne de fouilles posait un doute quant à la datation des ossements humains. En effet, J.FRAIPONT dénombre 6 individus dans la cavité tandis que J.HAECK en dénombre 8 sur la terrasse, qui appartiennent à l'âge du Fer, alors que ceux de FRAIPONT appartiennent au Néolithique. Mais HAECK signale une nette concordance entre ceux de la grotte et ceux de la terrasse, ils sont tous éparpillés dans un grand désordre, très fragmentés et montrant une absence de nombreux éléments du squelette. Il supposait que l'ensemble des ossements pourraient appartenir à un ensemble de sépultures à double degré d'inhumation et appartenant à un total de 8 individus. Après décharnement pré-sépulcral, il a envisagé l'éparpillement des os dans la grotte et sur la terrasse. Cependant, J.FRAIPONT mentionne un mur de pierres sèches bouchant l'entrée, alors qu'en 1958, J.HAECK n'en trouve aucune trace! La question reste donc en suspens, précise l'auteure Isabelle ERNOTTE.

4.AU 21e SIECLE

En 2003, certains de ces ossements humains ont été datés par méthode chimique. Les résultats prouvent que ceux rapportés par Julien FRAIPONT sont sans conteste néolithiques et non de l'âge du Fer !

BILAN

La grotte a servi d'habitat, de refuge temporaire et/ou de halte de chasse à plusieurs reprises et durant de longs intervalles à l'époque Moustérienne, Moustérien de tradition, acheuléenne et de technologie Levalloise.

On y retrouve des reste de repas, principalement du boeuf et du cheval. On ne peut pas affirmer que l'ours était consommé, mais il utilise les mêmes niches écologiques que l'homme, raison la plus probable de sa présence sur le site. Quant à l'hyène, elle venait ronger les ossements abandonnés quand l'homme était absent ou même s'y réfugier.

Certaines choses restent encore à éclaircir, si possible, comme la distinction des vestiges de 1890 entre Paléolithique moyen et Paléolithique supérieur. Quant au Néolithique, la pointe de flèche et les éclats de hache polie n'attestent pas suffisamment leur appartenance à cette période, et les vestiges lithiques de Julien FRAIPONT ont disparu en partie.

Le mobilier funéraire est généralement pauvre, à part quelques artéfacts en silex, quelques lames et haches polies.

Conclusion de l'auteure:

Il y a eu 2 inhumations distinctes au Néolithique. La première dans la grotte et la seconde sur la terrasse. Les lieux auraient été réoccupés par une population de la Tène 1, expliquant la présence des tessons de céramiques. Pour l'âge du Fer, on ne possède qu'un unique tesson appartenant à un vase de type caréné et des tessons éclaboussés qui permettent de placer ce matériel au niveau de la Tène 1. Aucune datation n'a été réalisée sur les ossements de la 3ème campagne. Ils sont conservés dans la collection privée de J.HAECK/J.DESTEXHE et mériteraient une étude approfondie . Quant aux ossements de la collection J.HAECK correspondant à l'inventaire des années 60, ils ont été entièrement vernis et la datation radiocarbone ne pourrait se faire qu'en récupérant de la matière organique non contaminée à l'intérieur des os. Pour terminer, les vestiges du Moyen Âge peuvent être rapportés aux 12e-13e siècles (tessons des ateliers d'Andenne).

SOURCES

-Isabelle ERNOTTE: Approche Anthropologique de 4 Grottes du Néolithique de Belgique in Mémoire présenté en vue de l’obtention du Master en Histoire de l’Art et Archéologie, orientation générale-Promoteurs: Marcel OTTE et Michel TOUSSAINT. Université de Liège Faculté de Philosophie et Lettre Département des Sciences Historique Histoire de l’Art et Archéologie-Année académique 2011-2012.

Note: nous avons aussi pu consulter Jules HAECK: La grotte du Mont Falise à Antheit (sic), vallée de la Méhaigne, province de Liège in Bulletin de la Société belge d'Anthropologie et de Préhistoire-n°74/1954.


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