Dehalleux Joseph Ouffet
En 1943, s'amène à Ouffet, un cortège qui rappelait étrangement, en miniature, l'évacuation de 1940. Les paroissiens de Fraiture en Condroz entouraient des chariots tirés par de forts chevaux. Le nouveau curé, l'abbé Joseph DEHALLEUX, faisait son entrée accompagné de ses chèvres, cochons et poules sans oublier ses ruches qui suivaient un peu en arrière. Il déménageait de Fraiture à Ouffet.
Il trouva à l'église une chaire de vérité suspendue datant de 1655. Comme elle menaçait de s'écrouler sous son poids respectable, il était de forte stature, il en fit placer l'ambon sur un piédestal en pierre.
Les fenêtres laissaient pénétrer dans le sanctuaire une lumière d'un jaune-vert qui lui donnait l'impression de prêcher à des paroissiens au teint cadavérique. Aussi, en 1944, fit-il doubler les fenêtres par de magnifiques vitraux riches en couleurs représentant quinze mystères du Rosaire, tout en répandant des clartés plus joyeuses sur les fidèles.
Hélas, le 29 décembre 1944, une bombe volante V2 égarée qui, si elle ne fait pas de victime, s'écrase et explose à moins de cent mètres de l'église réduisant en miettes fenêtres et vitraux.
Sans perdre courage, le tout sera remis en place en moins de six mois.
Quelques mois auparavant, soit en juillet 1943, notre nouveau curé eut le désagrément de voir les allemands, en mal de bronze pour leurs canons, enlever nos deux plus grosses cloches qu'ils emmenèrent à Hambourg.
Monsieur l'abbé Gendarme, notre vicaire d'alors, apprit en 1945, qu'elles étaient très probablement rentrées à ... Anvers. Il voulut s'en assurer, en allant vérifier sur place il resta bouche bée en apercevant une nuée de cloches s'étirant sur près de cinq kilomètres. Qu'à cela ne tienne, il se mit en devoir de retrouver les nôtres.
Bref, les cloches rentrèrent à Ouffet mais... sur le parvis de l'église, elles n'étaient encore nulle part.
Un lundi matin, notre curé, notre vicaire et leur ami Eugène de Fraiture eurent l'audace d'entreprendre la tâche éreintante de les remettre en place. Il y a comme cela des curés qui aiment tout autant le marteau que le bréviaire, que voulez-vous, tous les moyens de salut sont bons!
Après avoir, à plusieurs reprises, frisé la catastrophe et déjoué les pièges d'une entreprise de pareille envergure et sans se préoccuper de la sueur dépensée, ils eurent la grande joie d'user leurs dernières forces pour faire sonner, à toute volée, les cloches de 1.100 et 800 kilos.
Fourbus, ils sont rentrés au presbytère pour arroser quelque peu cet exploit.
Monsieur le vicaire sort trois verres du buffet et monsieur le curé attrape la bouteille ... Eugène, assoiffé, lampe sa ration d'un seul coup. Le vicaire, prudent de nature, flaire le nectar pour le reposer aussitôt: Eugène, tu as bu du vinaigre! En effet, vérification faite, monsieur le curé, dans sa fatigue, s'est trompé de flacon et Eugène, dans sa soif, n'a rien remarqué.
A l'automne, fin des années 1950, notre curé fait appel à deux ados bénévoles pour descendre sa provision de houille dans la cave de la cure. Chargés d'un sac poussiéreux sur le dos, les deux lascars, L. Ba... et P. Ma... d'Ouffet passèrent plusieurs fois devant un tonneau de vin sur lequel était posé un verre retourné. Tentante, l'occasion de se racler la gorge était trop belle d'autant plus qu'ils retournaient dîner.
A leur retour, rien n'avait changé sauf peut-être ce petit papier glissé sous le verre et qui disait «Veillez à bien fermer le robinet !»
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