Carrières Ouffet
Préface
L’Exploitation des Carrières à OUFFET. J-C Thirion
Ouffet doit aussi son développement et son économie à l’exploitation des carrières, aussi, l'école primaire faisait déjà œuvre de pédagogie en intéressant les jeunes élèves au dur métier de carrier
Son âme et son cachet, son image et ses paysages ont été élaborés grâce aux psammites des tiges et aux calcaires des chavées.
C’est principalement au XIXème siècle que des « Maîtres de carrière » se sont intéressés au sous-sol d’Ouffet, attirés d’une part, par les moyens de communication : « betchètes » sur l’Ourthe ou trams sur terre ferme pour le transport et d’autre part, par une main d’œuvre abondante dans la région.
Depuis plus de 100 ans, Ouffet vibre au rythme des explosions tonitruantes, au son assourdissant des concasseurs et à celui rythmé des ciseaux, des « cherpias », des « spinètes » ou encore des bouchardes.
Sur le chantier, la poussière assurait le décor et se laissait emporter par les chaussures des visiteurs, lesquels ne manquaient pas de partager la « goutte de péket » avec les ouvriers pendant les pauses. Il faut noter que le carrier disposait toujours d’un petit verre dans le chétron de son coffre à outils.
Tout comme la « pierre d’avoine », roche tendre, le « petit granit et le grès », roches dures, ont permis l’érection de grands bâtiments dont de nombreuses fermes : l'aspect de la pierre bleue devenant gris au fil du temps, par l’altération du carbone contenu.
L’exploitation, l’extraction, le débit, la taille du matériau et sa mise en œuvre ont participé du manière importante au développement du village.
Les pierres ont été utilisées dans la construction (moellons présentés en boutisses, panneresses ou autres) ou le pavement des routes, lesquelles ont remplacé peu à peu les chemins empierrés. Ces mêmes pierres ont été acheminées vers la région liégeoise toute proche ou encore au loin, vers le nord des Pays-Bas, pour assurer la rigidité du soubassement des digues.
Quant aux ouvriers, pour mieux gagner leur vie, ils leurs arrivaient de charger leur coffre à outils sur une brouette pour aller faire fortune dans la carrière voisine.
Nombreux parmi eux étaient ceux qui exerçaient encore leurs compétences dans les fermes comme saisonniers.
Petit historique des carrières d'Ouffet
Avant les années 1900, la vie économique d'Ouffet était centrée sur l'agriculture, l'élevage et l'industrie de la pierre et c'est encore en partie le cas aujourd'hui. Depuis quelques années, un parc artisanal toujours en extension est venu renforcer le potentiel économique de la commune.
Mais ce qui fit la véritable renommée d’Ouffet c'est l’exploitation de son sous-sol.
Dès 1870 un grand nombre de carrières de granit et de grès s'ouvrirent, notamment à Tem, au Brihi Tiyou, au Troïdo, à Crossèye et employèrent un grand nombre d'ouvriers de la pierre car tout était manuel. Du tailleur de pierre en passant par le crassi, l'épinceur, le roqueteur............ au moins 600 ouvriers étaient occupés dans les différents travaux.
De 1815 à 1910, la population est passée de 672 à 1860 habitants : en somme, elle a triplé en un siècle.
L'extraction principale, c’est la pierre bleue, dénommée «petit granit». Cette qualification est due aux petits cristaux qu’elle renferme et sa cassure fraîche rappelle l’odeur et la structure du granit authentique. Le petit granit est une pierre relativement tendre qui se laisse aisément tailler et sculpter.
Les « Vieux » d’Ouffet racontent que des ingénieurs sont venus autrefois se poster des journées entières dans le clocher de l’église afin d’établir la carte géologique. Celle-ci nous montre qu’Ouffet fait partie d’un banc rocheux qui se développe sur 35 km environ sur une ligne qui va de Sprimont à Havelange.
Aux alentours de 1900, l'industrie des carrières battait son plein. Sur le coup de midi, les rues de Hody et de Temme s'emplissaient d'une véritable procession d'hommes poussiéreux retournant chez eux pour prendre leur repas. Beaucoup d'ouvriers venaient aussi du Namurois.
Les pierres d'Ouffet jouissaient d'une réputation nationale. Les devis portaient souvent la mention «en pierres d'Ouffet». Cette prospérité industrielle a exercé une réelle influence sur la physionomie du village. De nouvelles routes sont créées. Plusieurs de nos rues doivent leur aspect à cette époque. Avant la guerre de 1914 – 1918, les ouvriers gagnaient de 0,25 fr à 0,55 fr l'heure.
Les spacieuses maisons bourgeoises étalaient fièrement leur façade ornée de belles pierres de tailles, voire même de sculptures…
La nature du sol et l'exploitation de la pierre sont à l'origine de certains toponymes : so pièreu, à pièreu, Néblon-l-Pièreu, pièrerie ou encore so les rotches ou sur les roches.
Entre 1930 et 1940, l’industrie des carrières de petit granit atteint son point culminant. Nous tirons cette information d’une conférence donnée au Ministère des Travaux publics donnée par monsieur LEMAIGRE le 5 octobre 1954. Voici les chiffres qu’il donne pour l’ensemble du pays :
1938 1953 Ouvriers et employés 10.000 5.000 Pierres façonnées 20.000m³ 10.000m³ Bordures vicinales 350.000m Ct 60.000m Ct
Ces chiffres sont assurément très éloquents : ils signifient la mort lente d’une industrie essentiellement nationale, tels sont les mots de monsieur LEMAIGRE. Qu’en est-il de cela pour Ouffet ?
C’était l’époque des migrations de carriers venant des pays de Namur et d’Ecaussines, dont les familles sont en 1956 bien implantées chez nous.
Et la situation changea…
Une végétation abondante s’insinua dans la plupart des chantiers qu’on devait abandonner faute de commandes. Certains de ceux-ci sont presque entièrement retournés à l’agriculture. Les familles des anciens maîtres de carrières n’ont pas pu conserver leur fortune et leurs opulentes demeures ont été vendues !
Le sous-sol d’Ouffet était cependant loin d’être épuisé.
C’est probablement ce que c’est dit le jeune entrepreneur Jean DEPAUW qui, un beau matin de novembre 1945 arriva sur le sentier de la carrière de Temme désespérément abandonnée.
Par la suite, Jean DEPAUW repris l’exploitation des gisements de grès et de pierre bleue de Lizin ainsi que la carrière du Troydo. Il occupa dès lors une soixantaine d’ouvriers et c’est entre 1948 et 1954 que l’entreprise atteint son plus grand pic de production. Il outille sa carrière de machines de plus en plus modernes.
Il ne fut pas le seul maître de carrières partisan de la mécanisation : la carrière Raymond CHARTIER et fils se muni d’un charroi à « l’américaine ».
La Revue du Conseil Economique Wallon dans son numéro de décembre 1954 sous le titre « Nouveaux développements de l’industrie wallonne » écrit ceci : autre industrie importante, sinon dans la région, du moins dans l’arrondissement de Huy : les carrières de petit granit.
Deux d’entre-elles viennent de se rééquiper entièrement : les carrières BEAULIEU – PETERS et les carrières DEPAUW toutes deux à Ouffet.
Ces deux entreprises installent des débiteuses à disques diamantés de 0,30à 1,60 m de diamètre. La rapidité de travail, effectué auparavant par fil hélicoïdal et débiteuses à lames, est sans commune mesure avec celle des anciens procédés. Là où le fil avançait de 5 à 8 cm à l’heure, l’avancement du disque passe de 14 à 25 cm/minute !
Les débiteuses installées sont entièrement conçues et réalisées par leurs propriétaires : elles sont à avancement automatique et de ce fait sans doute unique en Belgique.
Ces deux exploitations mécanisent également leur manutention, installent des aspirateurs de poussière et renforcent leurs équipements électriques.
L’accroissement de productivité découlant de ces modernisations est tel que le prix de vente de l’une et l’autre de ces firmes est réduit de 20 à 30%.
Afin de faire face à l’afflux de commande, leurs chiffres d’affaires ayant triplé en six ans, les deux carrières élaborent un nouveau plan d’équipement qui prévoit entre autre la remise en exploitation de sites abandonnés.
Nous ne pouvons passer sous silence les dures journées de travail d’antan par leur durée exagérée et les violents efforts que les hommes devaient fournir (voir plus bas : grèves de 1886). C’est avec soulagement qu’ils acceptent l’aide des machines.
La prospérité y gagne aussi, d’une part par la mise au travail d’un nombre toujours croissant d’ouvriers et d’autre part par les commandes toujours plus nombreuses arrivant enfin de l’étranger : Hollande, France, Italie…
Quant aux fournitures dans le pays, nous pouvons citer une quantité impressionnante de matériaux pour les routes, les ponts, les bâtiments publics…
Tous les espoirs étaient donc permis pour l’avenir d’Ouffet, c'était sans compter sur les lois du marché comme expliqué plus loin par Jean Depauw fils. Voir carrière Gripierres.
Les grèves de 1886
Cette année là d'importants mouvements de grève partant de Sprimont vont secouer la régions et les patrons de carrières. En savoir Plus
Note
Le 4 décembre 1888, le conseil communal d'Ouffet est d'avis de faire opérer quelques fouilles dans le bois dit de Pinsonchant dans le but de rechercher des gisements de grès. Ces fouilles seront faites de manière à endommager le moins possible le bois communal.
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